"Ce coin de jardin, à l'abri de tout, n'est-il pas merveilleux ? la silhouette des lotus, si attirante, le gazouillis des loriots, si agréable ? apparemment, tous ces êtres jouissent du bonheur d'être là. Il n'y a rien à en dire. Et les hommes, dans quel but sont-ils venus sur cette terre ? Que ne connaissent-ils la même lenteur, la même confiance et le même bonheur de vivre que les plantes !
Je viens de terminer une lecture sublime : "L'éternité n'est pas de trop" de François Cheng. Ce livre raconte l'histoire d'amour interdit entre Lan-ying femme brisée par un terrible mariage et diverses épreuves et Dao-Sheng guérisseur et devin, qui, trente ans après leur première "rencontre" renonce à prononcer ses voeux dans le monastère taoïste où il vit pour la retrouver et la soigner... c'est un livre dans lequel j'ai retrouvé tout ce que j'aime : La métamorphose des êtres ( ici par l'amour), l'attention au rayonnement qui émane des choses et des êtres, la patience, la lenteur, l'écoute (dont l'écoute du "shen", du "souffle des chants"...), les rythmes de la nature... J'ai vraiment eu l'impression d'être "tirée par le haut" par cette lecture ce qui il faut bien dire est assez rare !
"A présent, pour la première fois, il réfléchit sur l'être de la femme, sur l'essence du féminin. Il a la révélation que le charme de la femme, quand celle-ci n'est pas rabaissée par toutes sortes de conditions extérieures, vient de ce qu'elle est la magique transformatrice, virtuellement capable de tout retourner en grâce aérienne, et aucune tentative de l'avilir n'y peut rien. Elle est chair certes, mais combien cette chair se transmue sans cesse en murmures, en parfums, en radiance, en ondes infinies dont il importe de ne pas étouffer la musique. A bien y réfléchir, le corps de la femme incarne le plus ardent miracle de la nature. Ou, plus précisément, c'est la nature qui en elle se résume en miracle. N'est-il pas vrai que toute la beauté de la nature s'y trouve : douce colline, secrète vallée, source et prairie, fleur et fruit ? Ne faut-il pas appréhender ce corps comme un paysage ? Or, comme le moine taoïste l'a enseigné, dans un paysage, plus que les entités substantielles, il faut apprendre à communier surtout avec ce qui émane d'elles, le rayonnement vert qui vient des mousses, les vagues sonores qui viennent des pins, les senteurs qui viennent de tous les sucs propagés par la brume et le vent. Lui, Dao-sheng, en tous cas, subissant pour l'heure la privation, apprend à savourer par la patiente lenteur. Il éprouve la curieuse sensation qu'à défaut d'accéder à la chair, il entre plus avant dans ce qui fait réellement l'être de la femme, à savoir ce qui rayonne d'elle. En présence de Lan-ying, il s'abandonne aux ondes rythmiques qu'impulsent le souffle et le fluide qui circule en elle. Ces ondes le mènent, avec une surprenante sûreté, au secret ravissement."
il y a deux ans , on m'a offert ce livre que j'ai également beaucoup aimé .. ce que tu en dis avec beaucoup de sensibilité correspond tout à fait à ce que j'ai ressenti à cette lecture, merci de partager ainsi ton émotion.
RépondreSupprimerLa poésie, si ne n'est la théorie, est très belle en tout cas ...
RépondreSupprimerAh ! que ferions nous sans la femme " ardent miracle de la nature "!
Mais bon ... les hommes ... j'attends un aussi joli billet de ta part pour savoir comment tu les perçois !
Très beau texte...
RépondreSupprimer"Il a la révélation que le charme de la femme, quand celle-ci n'est pas rabaissée par toutes sortes de conditions extérieures, vient de ce qu'elle est la magique transformatrice, virtuellement capable de tout retourner en grâce aérienne..."
Ce passage me touche ...
A lire et à relire à l'ère où la femme est plus que jamais "standardisée", réduite à son corps, à son "sex-appeal" et à sa fonction maternelle et sociale, malgré une libération "de surface"...
La suite du texte est poétique mais, si on le lit bien, elle cantonne quand même la femme à son corps et au charme sensuel qui en "émane"...
La Femme (et la Féminité), c'est tellement plus riche que cela...
La femme est transformatrice, initiatrice, magicienne, protectrice, accoucheuse...et elle n'accouche pas que d'enfants , mais de tout ce qui est vivant, nouveau, inédit, destiné à grandir et à croître... elle est celle qui accueille la Vie et qui l'aide à grandir...
Elle est la Matrice dans laquelle germe l'avenir du monde...Elle est puissance de Vie,
elle est F(l)amme de Vie.
Mais pour accéder à cette autre "face" de la féminité, beaucoup plus vaste, il faudrait, je crois, ne plus se laisser définir...par des hommes...
La Féminité, pour un homme, restera toujours un mystère...un mystère attrayant , mais un mystère quand même...
Seule une femme peut parler de l'"essence" de la Féminité... :-)
Il y a longtemps j'ai lu un livre de lui, qui traitait de l'amitié, un de ses premiers bouquins...je ne sais plus le titre. C'était formidable.
RépondreSupprimerJe reviens pour préciser ma pensée ...
RépondreSupprimerFrançois Cheng est sans nul doute un immense écrivain, d'une grande finesse...et ce qu'il dit de la "femme-nature" est splendide.
la Femme est en effet "Nature".
Mais regardons autour de nous : que fait-on à la nature ?
On la célèbre d'un côté, vantant sa beauté, sa douceur, son charme, sa "magie"...
Mais, d'un autre côté, (dès qu'on n'est plus "en week-end"?), on l'exploite, on la pille, on la viole, on la détruit...pour notre "confort".
J'ai bien peur qu'il en soit de même pour la femme...
"Magnifiée" d'une main...et "très peu respectée" de l'autre !
Merci à tous pour vos commentaires et bien sûr à toi la Licorne pour cette analyse profonde et absolument passionnante, d'abord je veux dire que c'est un extrait et seulement un tout petit extrait du livre que j'ai choisi pour vous donner envie de lire le livre, apparemment c'est réussi !!!! Je l'avais d'abord mis parce qu'il me semblait que ce texte donnait à voir au delà des apparences, voir les choses et les êtres par ce qu'ils dégagent et se qui émanent d'eux, bref une autre façon d'appréhender le monde que l'on soit homme ou femme,après évidemment c'est un très beau texte sur la femme et la feminité, dans ce texte La Licorne il me semble normal qu'il s'intéresse au corps et au charme sensuel qui en émane car il s'agit d'une histoire d'amour, c'est le regard d'un homme amoureux sur la femme qu'il aime éperdument et dont le seul contact autorisé se résume à toucher la main (passage sublime) et le plus souvent à simplement la regarder (et même pas toujours !!!)... ta comparaison sur la façon dont les femmes et la nature sont traitées est tout à fait juste, mais heureusement qu'il y a des poètes pour nous montrer qu'il existe d'autres voies...
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